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L'agressivité : comment gérer une conduite agressive

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souris65
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L'agressivité : comment gérer une conduite agressive

Message par souris65 »

N'importe quel chien peut mordre... et même un membre de sa famille!


Les personnes mordues par un chien le sont majoritairement par celui de la famille ou d’un proche, et selon les études menées à ce sujet, en France ou ailleurs en Europe, aux USA ou au Canada, les principales victimes sont les enfants.

De plus, dans ces bilans de morsures, les races les plus représentées ont été celles considérées comme non dangereuses par le législateur, voire même décrites comme « inoffensives » ! par certains professionnels.

Nous avons donc choisi d’évoquer dans cet article les agressions dont on peut être victime de la part de son propre animal ou de celui d’un proche.

Les conduites agressives d’un chien ne sont généralement pas mono causales, aussi peut-il être dangereux de vouloir trop schématiser et généraliser. C’est par l’étude minutieuse et personnalisée des contextes socio familiaux, avec l’aide d’un spécialiste des interactions de l’Homme et du Chien, que l’on arrivera à discerner avec précision les motivations à l’origine d’une conduite agressive.

Dans un souci de prévention, nous allons tout de même tenter d’éclairer quelque peu sur les causes d’agressions du chien familier, pour aider à les éviter.

Comment un chien en vient-il à adopter des conduites agressives sur ses proches ?
Aucun comportement ne peut être expliqué hors de la situation dans laquelle il apparaît. L’attitude agressive n’échappe pas à cette règle, et c’est ainsi qu’un chien n’est jamais « méchant* » ou « agressif », comme cela et pour rien, au milieu de nulle part.

Quand l’animal grogne (souvent ou occasionnellement) dans des circonstances identiques ou variables, il envoie des « messages » que ses maîtres ne doivent ni ignorer ni banaliser.

Considérer que « ce chien a simplement mauvais caractère », c’est déjà s’exposer à une agression au moment où l’on ne s’y attendra pas, qui laissera dans l’incompréhension de ce qui s’est passé, avec la peur de la récidive et un fort sentiment d’ingratitude de la part de ce chien si chéri.

Souvent inexplicables pour leurs victimes non informées, ces conduites agressives du chien ont pourtant toutes (d’un point de vue canin s’entend !) leurs motivations légitimes.

Un comportement, que l’on peut définir comme un état temporaire, le plus souvent adaptatif, est une réponse à ce qui est vécu par l’individu.

Pour le comprendre, il faut donc connaître les émotions qui l’animent. On cherchera les causes et déclencheurs dans le milieu de vie, et on examinera les circonstances et buts recherchés par le chien qui a mordu. L’examen de la situation portera également sur le déroulement de chacune des 3 phases d’une séquence d’agression, et l’on pourra alors comprendre comment on a pu en arriver à la morsure.

* « Méchant » ne devrait pas être employé pour qualifier un chien qui menace ou mord, car la notion de nuire à l’autre, contenue dans ce mot, ne peut pas être appliquée au chien.

Une conduite agressive (affrontement codifié et ritualisé) avec ses 3 phases et leurs fonctions

C’est l’aspect ritualisé de ces phases qui rend les choses prévisibles par les chiens entre eux mais aussi par les humains qui en sont avertis, et qui ainsi peuvent s’y adapter.

De manière générale, la conduite agressive du chien qui veut -faire cesser- ou -obtenir- se déroule en 3 étapes :

1ère étape : la menace
La menace est normalement destinée à intimider un individu et éviter l’attaque proprement dite, si cela est possible. Le chien tente de prévenir l’autre qu’il ne sera pas sans risque de continuer dans ce qu’il a entrepris. En cas d’inefficacité, la menace sera mise à exécution par morsure.

A noter que dans le comportement de prédation (poursuite et morsures sur proie) la phase de menace n’existe pas : ce qui serait une bien piètre technique de chasse, convenons-en !!

A noter également que cette phase de menace est volontairement supprimée par un apprentissage spécifique dans le dressage au mordant (voir + loin)

Les principales expressions corporelles de la menace
Dans l’attitude offensive, l’animal se tient droit et les pattes raidies, le poil hérissé, la queue haute, les oreilles vers l’avant.
Dans l’attitude défensive, l’animal se tient plutôt l’échine abaissée et hérissée, la queue basse voire rabattue, les oreilles en arrière.

Ces attitudes sont accompagnées :
• de grognements plus ou moins sonores et/ou d’aboiements
• de mimiques faciales avec museau retroussé (plus les dents sont découvertes, plus le regard est fixe et/ou la pupille dilatée, plus c’est à prendre au sérieux !)

La menace : savoir la respecter
Ces signaux canins, posturaux et sonores, parfaitement « signifiants » entre congénères, reçoivent évidemment les réponses canines adaptées.*
Par contre, les êtres humains décodent et interprètent souvent mal les menaces de leurs chiens (surtout les plus jeunes enfants), et en conséquence ne produisent pas les réponses adéquates. S’il est capital de savoir reconnaître les signaux de menace d’un chien, il l’est tout autant de les respecter. Car si l’animal menace, c’est pour prévenir son entourage que quelque chose l’inquiète ou lui fait peur, l’incommode ou lui fait mal, et qu’il souhaite que cela cesse.
Pour échapper à l’inévitable morsure qui suit une menace non respectée, le mieux est de ne pas insister dans la voie engagée.
(* à noter cependant que par sélection artificielle ou par chirurgies de convenance, l’homme a produit ou modifié des chiens qui entre eux, ont un langage gestuel bien moins finement expressif par les yeux perdus sous les poils, les oreilles trop longues et tombantes, la queue coupée, etc.)

2ème étape : passage à l’acte, la morsure
Prise en gueule plus ou moins fortement tenue, dosée et lâchée en fonction de la situation et de l’adversaire, la morsure n’est pas faite pour tuer sauf dans 2 cas bien particuliers*.
Le chien dose, maintient puis lâche sa prise en gueule, selon la réaction combative ou soumise de l’autre.
C’est dans ses interactions avec sa fratrie et sa mère (jeux/batailles) au cours de ses premières 8 semaines de vie, que le chiot apprend ces phases rituelles des combats en dosant sa morsure (on parle d’apprentissage de l’inhibition de la morsure).
Toute la qualité de la socialisation du jeune âge d’un chiot montre ici son importance capitale.
*cas particuliers :
-- la poursuite, saisie et morsure dite « délabrante » d’une proie. Nous en connaissons tous l’illustration familiale, avec la peluche (proie) que notre chiot ou chien tient en gueule et secoue vigoureusement de droite à gauche pour la « tuer » !!
-- le dressage au mordant, où même si l’adversaire se « soumet » c'est-à-dire ne bouge plus, le chien continue de tenir fortement et ne lâchera pas sans ordre du maître

3ème étape : l’apaisement
Le « vainqueur » posant sa patte sur l’autre ou en le léchant marque la fin du combat, pour éteindre toute velléité agressive et signaler la paix revenue (attention donc à ne pas interpréter ces léchages et patte tendue sur le maître qui vient de se faire mordre, pour des gestes de repentance !)

Les différentes formes d’agressions

Le stimulus déclencheur d’une agression, peut être endogène (si sa source se trouve dans l’organisme de l’individu lui-même, par exemple une douleur, une peur, la faim…) ou exogène (s’il provient de son environnement perceptif, de son milieu de vie comme le comportement d’un congénère ou d’une autre espèce). L’un de ces stimuli pouvant éventuellement provoquer l’autre : quand le comportement d’un autre (stimulus exogène) va éveiller la peur (stimulus endogène).
Il a été observé différentes formes d’agressions chez le chien, et en 1969, l’éthologiste américain K.E Moyer en a proposé une classification qui fait autorité et permet de les distinguer. Nous avons retenu les plus courantes, et les examiner aidera à mieux s’en préserver au sein de la famille :

• L’agression à caractère hiérarchique
Entre canidés, cette agression (pas faite pour tuer) sert à marquer sa supériorité, à affirmer son pouvoir sur l’autre. Toujours impressionnante, parfois violente mais souvent brève, elle est courante entre mâles. Chaque individu va tenter de se faire plus fort, plus bruyant, plus grand qu’il n’est pour impressionner l’autre, aussi bien dans la phase de menace que dans celle de l’attaque. Cette agression cesse quand l’un des deux adopte une posture de soumission plus ou moins marquée, ou bien prend la fuite.
Le chien de la famille peut agresser de cette manière un membre de sa famille pour défendre ou maintenir des privilèges qui lui sont laissés au quotidien, et que l’on remet en question. Exemple très connu: le chien qui occupe librement fauteuils et canapés, et qui grogne quand on le pousse pour s’y installer, et va jusqu’à mordre si on insiste trop !

• L’agression par irritation ou douleur
Pour tenter d’échapper à une souffrance (le pied qui lui marche dessus ou la main qui caresse trop rudement) le chien peut grogner et mordre.
Souvent observée chez l’animal vieillissant et plein de douleurs, malmené par un enfant par exemple, ou lors de soins à exercer sur un animal malade, ou lors de toilettages ou brossages répétitifs et redoutés, etc. Dans cette agression, il arrive que la première phase de menace soit inexistante : quand on a mal, il faut que cela s’arrête tout de suite : pas le temps de prévenir que ça va mal !

L’agression par peur
Sans doute la plus fréquente alors même que cette émotion est l’une des plus mal reconnues par les maîtres.
C’est le franchissement brusque de sa distance dite « critique »* qui fait craindre à l’animal cette intrusion, surtout s’il n’a aucune possibilité de fuite. C’est le cas du chien tenu en laisse qui voit s’approcher un congénère ou un humain qui l’inquiète. Sans pouvoir fuir pour rétablir la distance critique, il ne reste à ce chien effrayé qu’à menacer pour faire fuir ou reculer l’autre et mordre si la menace n’a pas fonctionné.
C’est le cas également très courant, du chien qui prend peur quand on le poursuit pour le punir ou lui reprendre un chapardage, jusqu’à l’acculer dans un espace restreint, derrière ou sous un meuble. Mis dans une situation sans issue, il n’a plus d’autre ressource d’autodéfense que menacer ou même mordre la main qui s’avance et qui veut absolument l’attraper.
L’abord du chien par surprise (entre autre quand il dort, quand il mange) suscite sa peur et sa réaction peut être celle de la menace.
Dans nombre d’agressions motivées par la peur, les 3 phases peuvent être rendues un peu flou par l’intensité de l’émotion qui pousse l’animal à des réactions extrêmes. On comprend que pousser ainsi un animal jusque dans ses derniers retranchements, fait prendre de grands risques de morsures très graves parce qu’exercées parfois avec l’énergie du désespoir par le chien.
* distance critique : zone personnelle limite (fluctuante en fonction du sujet, de son histoire, son état émotionnel et des contextes) que « dessine » un individu autour de lui et dans laquelle il peut ou non tolérer une approche. Le franchissement rapide de cette zone déclenche la peur.

• L’agression instrumentale ou morsure dite « instrumentalisée »
C’est l’agression la plus dangereuse, parce que l’étape de la menace n’existe plus.

--> Elle est le résultat d’un apprentissage volontaire dans le cas du dressage au « mordant* ».
Le but de cette technique est d’obtenir que le chien attaque une personne ciblée, automatiquement et sur ordre, et bien sûr sans la prévenir, pour ne la lâcher que sur ordre également. L’animal devient une arme, sa morsure est dite « instrumentalisée » (à ne mettre, on s’en rend compte, que dans des mains très expertes !), puisqu’on s’en sert comme d’un instrument !
* Ce dressage ne devrait être réservé qu’à des chiens qui seront employés à des métiers de la défense et/ou de l’attaque (police, armée par ex.) et effectué par des professionnels habilités.
Pour ce qui est d’un chien de famille qui serait dressé ainsi, on peut imaginer que dans un contexte de stress intense l’animal se désorganise émotionnellement, et échappe au contrôle de son maître en déclenchant une attaque violente

--> Ce peut être également un apprentissage involontaire:
Ex : un chien confronté à une situation stressante et qui se répète. Le toilettage douloureux ou les contraintes en espace restreint se reproduisant par exemple, signalent à l’animal que ses menaces sont inutiles et impulsivement il passe directement à la morsure. C’est désormais l’imprévisibilité de ses attaques qui rend l’animal dangereux.

On l’aura compris, n’importe quel chien peut mordre, il suffit déjà pour cela qu’il ait peur ou mal.

Et même si pour lui le motif premier de son agression n’est pas la peur, cette émotion colore plus ou moins tout affrontement avec un ou des membre(s) de sa famille.
D’autres formes d’agressions du chien existent comme l’agression redirigée (quand l’animal ne peut atteindre ce qui l’agresse ou lui fait peur et qui se retourne sur celui -humain ou congénère- qui se trouve près de lui), l’agression maternelle (le cas de la mère qui protège ses petits), l’agression territoriale, ou encore celle liée à la convoitise ou possession de nourriture ou d’objet. Ces morsures sont un peu moins nombreuses, au moins parce que beaucoup savent s’approcher d’une mère et de ses petits avec précautions et comprennent qu’il ne faut pas déranger un chien qui mange, sous peine, chez certains sujets sensibles, de déclencher les plus grandes (et légitimes) inquiétudes

co- rédaction de Danièle Mirat et Laurence Bruder-Sergent, site: http://www.comportement-canin.com
Nier la souffrance de l'animal entraine vite à devenir indifférent
à celle de l'humain.


Pour protéger, il faut aimer. Pour aimer, il faut connaître.
"Sans les animaux le monde ne serait pas humain" Kl. Matignon


Calins à vos dalmatoutous de Sabine
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